Introduction
L’État peut intervenir de plusieurs manières sur un marché:
- Interdiction pure et simple (marché rendu illégal, sécurité/santé/environnement);
- Réglementation sur le produit (normes de qualité/santé/sécurité);
- Contrôle des quantités (obligation d’achat, quotas);
- Contrôle des prix (prix plafond, prix plancher);
- Impôts et subventions (chapitre suivant).
Interventions
Les contrôles de prix
L’État intervient sur le marché et en réglemente le prix lorsqu’il juge le prix d’équilibre inadapté ou injuste. Par exemple:
- Un taux d’intérêt trop élevé: la limite de l’usure.
- Un salaire top bas: salaire minimum.
- Un loyer trop cher: contrôle des loyers.
- Les prix trop bas des denrées agricoles: les prix de soutien.
Pourquoi?
- Au-delà de la question du “prix juste”, cette mesure est aussi moins coûteuse pour l’État qu’une subvention.
- L’État peut aussi considérer que le marché ne fonctionne pas de manière efficiente en raison d’un pouvoir de marché d’un côté ou de l’autre.
- Souvent aussi, l’État instaure un contrôle de prix suite à des pressions de lobbies, qui essayent de créer des situations de rentes.
Plafonds et planchers
L’État instaure un contrôle de prix lorsque, par voie légale, il intervient sur un marché particulier pour empêcher que le bien ou service ne soit échangé au prix d’équilibre.
- Il peut imposer un prix maximal, ou prix plafond: le bien ou le service ne peut pas être échangé à un prix supérieur à ce plafond.
- Il peut imposer un prix minimal, ou prix plancher. le bien ou le service ne peut pas être échangé à un prix inférieur à ce plancher.
Contraignes
Un contrôle de prix n’a de sens que s’il est effectif, c’est-à-dire contraignant pour une partie du marché:
- Par contraignant, on entend que des échanges désirés au prix limite ne peuvent pas se réaliser et restent donc frustrés.
- Pour que le prix plafond soit contraignant, il doit donc être inférieur au prix d’équilibre
- Pour que le prix plancher soit contraignant, il doit être supérieur au prix d’équilibre.
Attention!
Attention à la confusion possible entre le plancher d’une pièce (sous nos pieds) et le plafond (au-dessus de nos têtes).
Graphiquement, sur un marché, c’est l’inverse qui est vrai, car le plafond est un maximum qui empêche le prix d’aller plus haut et doit donc être plus bas que le prix d’équilibre. C’est l’inverse pour le prix plancher.
Effets
Un prix plafond qui est contraignant crée:
- Une pénurie parce que QD > QO.
- Exemple: le marché du logement, où souvent l’incitation à construire (offrir) est faible en raison du plafonnement des loyers.
- Un rationnement avec des dommages collatéraux.
- Exemple: Les files d’attente, le temps perdu passer à chercher, la discrimination pratiquée par les vendeurs, etc.
Marchés et intervenants
Sur certains marchés, on trouve différents groupes de pressions:
- Marchés agricoles: l’offre, avec les groupements de producteurs;
- Marché du logement: la demande avec les représentants des locataires;
- Marché du travail: L’offre avec les syndicats de travailleurs et la demande avec les associations patronales. La protection d’un groupe d’intérêt peut se faire aux dépens d’autres groupes, en particulier l’autre côté du marché, mais celui-ci n’est pas toujours aussi bien représenté.
Exemple: Logements
Le contrôle des loyers est une forme de prix plafond appliquée au marché du logement:
- La réglementation rend illégale la fixation d’un loyer plus élevé que le niveau fixé par la loi.
- La réglementation peut concerner les augmentations possibles plus que le loyer lui-même, mais l’effet sera semblable (le loyer sera en-dessous de sa valeur d’équilibre).
- Cette réglementation génère une pénurie sur le marché du logement si le loyer est fixé plus bas que le niveau d’équilibre.
A court terme, offre et demande sont très inélastiques: Délais de constructions importants et bien de première nécessité.
À long terme, pénurie s’aggrave car le plafonnement des loyers provoque:
- Du côté de l’offre: diminution de la rentabilité immobilière et moins de nouveaux logements + détérioration de la qualité par une réduction de l’entretien des logements.
- Du côté de la demande: le faible niveau des loyers attire des gens en ville et augmente la demande de logements.
Nuances
La situation de référence de cette analyse présuppose la concurrence parfaite sur le marché du logement! Or:
- Le logement est un service extrêmement hétérogène;
- Les coûts de prospection et de recherche sont importants (l’information n’est pas parfaite). On estime ces coûts entre 2500 CHF (1 pièce) et 10 000 CHF (5 pièces). À cela, il faut ajouter les coûts psychologiques et une mobilité réduite.
- Problème du hold up, car asymétrie: le bailleur a aussi des coûts mais d’env. 1300-2500 CHF.
- Le marché est mince avec peu de régies et de promoteurs immobiliers qui se partagent un canton ou une région.
Efficience et concurrence imparfaite
Dans un contexte de concurrence imparfaite, on peut montrer qu’un contrôle des loyers peut améliorer l’efficience:
- Critère d’équité: logement étant une grosse dépense pour beaucoup de ménages à bas revenus, toute hausse des loyers implique une augmentation des inégalités.
- Par ailleurs, un ménage aisé peut se rabattre sur un logement plus petit ou de moindre qualité, tandis qu’un ménage à faible revenu se trouve limité dans ses choix de réduire sa quantité de logement.
Le salaire minimum
Salaire minimum: plancher sur la rémunération des travailleurs. Quel a-t’il impact sur le marché du travail?
- Très ancienne institution:
- Historiens mentionnent des villes au Royaume Uni où l’on fixait des minima déjà en 1524;
- Lois nationales sur le salaire minimum apparaissent pour la première fois en Nouvelle-Zélande (1894) et en Australie (1896) et au Royaume Uni en 1909;
Des fois les États fixent des salaires minimum qui maintenant sont au-dessous du salaire d’équilibre, ce qui est futile.
Remarques
- Substitution technique: À terme, du côté de la demande, les entreprises peuvent substituer les travailleurs non qualifiés par des machines.
- Le salaire minimum est parfois imposé avec une couverture partielle. Cela peut causer des écarts de salaires encore plus importants dans le secteur non couvert.
- Pas de consensus empirique: Une étude très célèbre de 1994 (Card & Krueger) aux États-Unis confirmée par d’autres pour certains pays européens ne trouve pas d’effet négatif du salaire minimum sur l’emploi.
- Monopsone: Ce modèle théorique prévoit d’ailleurs une augmentation de l’emploi, à partir du moment où les employeurs ont un certain pouvoir de marché, ce qui n’est pas une hypothèse absurde. Ceci quand il y a qu’un employeur dominant.
Agriculture
- Dans l’agriculture, pour prévenir la baisse des prix et la disparition du secteur agricole, certains États pratiquent (ou pratiquaient) des prix de soutien (c-à-d. des prix plancher).
- Mais si on regarde l’effet d’un prix plancher sur la recette totale, il est incertain et dépend de l’élasticité de la demande!
- Contingents: Donc cette mesure est complémentée par un rachat des excédents par l’État.
- Ces excédents peuvent être transformés et revendus sur les marchés internationaux.
- En Suisse, contingents et subventions remplacés par les paiements directs.
Efficience et bien-être de la réglementation des prix
Il y a des gagnants et des perdants avec cette mesure. Peut-on les identifier et mesurer les gains et pertes sur le marché? Pour cela, on fait appel au concept de surplus des consommateurs et des producteurs.