Libertarisme
C’est quoi
Met l’accent sur la liberté individuelle et les droits de propriété. Chaque personne a droit aux fruits de son travail sans intervention excessive de l’État. État minimal.
Exemple
Pour écarter toute interrogation concernant les possessions initiales, imaginons, suggère Nozick, qu’il vous appartient de déterminer la répartition initiale des revenus et des richesses en fonction du schéma qui vous semble juste - cela peut être une répartition parfaitement égalitaire, si vous le souhaitez. Maintenant, la saison de basket-ball commence. Ceux qui veulent voir SportPerson jouer déposent dans une boîte 5 dollars chaque fois qu’ils achètent un ticket d’entrée. Les recettes de la boîte vont à SportPerson … De nombreuses personnes désirant voir jouer SportPerson, l’affluence est grande et la boîte bien pleine. À la fin de la saison, SportPerson possède 108 millions de dollars, bien plus que quiconque. Il en résulte que la répartition initiale, celle que vous estimiez juste - n’a plus cours. Cependant cette distribution a été volontaire.
Est ce que c’est juste que SportPerson gagne plus coéquipier.e.s? Pourrait-on donner une petite partie de l’argent de SportPerson et les donner aux autres coéquipiers? C’est ce qu’on fait avec le système de taxes pourtant, et ces deux questions sont très similaires. Cependant, nos réponses évoluent entre ces deux cas.
Certains pensent que de telles inégalités sont injustes et sont favorables à ce que le riche soit imposé au bénéfice du pauvre. D’autres s’inscrivent en faux contre une telle idée: pour eux, les inégalités économiques n’ont rien d’injuste, pour autant qu’elles ne tiennent ni à un usage de la force, ni à des pratiques frauduleuses, mais procèdent des choix que font les individus dans une économie de marché. Qui a raison?
Le point de vue utilitariste
Si vous pensez que la justice signifie la maximisation du bonheur, vous pourriez être favorable à la redistribution des richesses sur les bases suivantes: supposez que nous prenions à Bill Gates 1 million de dollars et que nous le répartissions entre une centaine de personnes dans le besoin, donnant à chacune 10 000 dollars. Dans l’ensemble, le bonheur augmenterait probablement. Cet argent, qui ne ferait pas défaut à Gates, améliorerait significativement la situation des bénéficiaires. Leur utilité collective croîtrait plus que celle de Gates ne diminuerait.
On pourrait, en s’appuyant sur cette logique utilitariste, soutenir une politique assez radicale de redistribution de la richesse. Celle-ci nous enjoindrait de procéder à une telle redistribution, du riche vers le pauvre, jusque ce que l’on atteigne un seuil où le dollar prélevé sur la fortune de Gates affecte ce dernier autant qu’il aide celui qui le reçoit.
Point de vue libertarien
Le simple fait d’imposer le riche pour aider le pauvre est injuste parce qu’il viole un droit fondamental. De ce point de vue, prélever de l’argent sur la fortune de Gates sans leur consentement, même pour une noble cause, est coercitif. Cela viole la liberté qui est la leur de faire ce qu’ils veulent de leur argent. Les libertariens sont favorables à la liberté des marchés et s’opposent à la régulation étatique, non pas au nom de l’efficacité économique mais au nom de la liberté humaine. Ce qu’ils veulent défendre en premier lieu c’est le droit fondamental de chacun à la liberté - le droit de faire ce que l’on veut des choses que l’on possède, dans le respect du droit des autres à en faire autant.
Base libertarienne
Si la conception libertarienne des droits est exacte, cela signifie que de nombreuses activités de l’État moderne sont illégitimes et portent atteinte à la liberté. Seul un État minimal - qui assure le respect des contrats, protège la propriété privée du vol et maintient la paix - est compatible avec elle Tout État qui s’arroge d’autres prérogatives que celles-ci es moralement injustifié.
La conception libertarienne des droits écarte toute loi qui exige de certaines personnes qu’elles en aident d’autres, y compris par l’impôt. Aussi désirable que cela puisse être pour les privilégiés d’apporter leur aide aux moins fortunés - en finançant leur assurance santé, leur logement ou leur éducation -, cette aide devrait être laissée à l’appréciation de chacun, et non rendue obligatoire par l’État. Pour les libertariens, les impôts et les taxes constituent une forme de coercition, parfois même un vol. L’État n’a pas plus le droit de contraindre les contribuables aisés à financer les programmes sociaux destinés aux pauvres qu’un voleur charitable n’a le droit de dérober de l’argent à une personne riche pour le donner à des sans-abri
L’argument libertaire
L’idée de propriété de soi: Si je suis propriétaire de moi-même, je dois également être propriétaire de mon travail. Pour être contraint à travailler, c’est mon maître et moi son esclave. Mais si je suis le propriétaire de mon travail, je le suis aussi de ses fruits. Si un autre les prends, mon travail (et par conséquent moi) est sa propriété.
Pour les libertariens, il y a une continuité morale de l’impôt (s’approprier une part de mes revenus) aux travaux forcé (s’approprier mon travail) et à l’esclavage (bafouer le droit de propriété que je détiens sur moi-même).
Objection
SportPerson a la chance d’exceller au basket-ball et de vivre dans une société qui valorise la capacité à sauter haut et à placer un ballon dans un panier. SportPerson a beau avoir travaillé dur pour développer ses talents, il ne peut porter à son crédit les dons que la nature lui a accordés ni le fait de vivre à une époque où ce jeu suscite un tel engouement et des rétributions pareilles. Tout cela n’est pas de son fait. Difficile de dire, dans de telles conditions, qu’il a moralement le droit de conserver tout l’argent que son talent génère. La communauté ne commet donc aucune injustice à son endroit, lorsque, pour le bien public, elle prélève un impôt sur ses revenus.
Ceci revient à demander si les talents de SportPerson lui appartiennent vraiment. Pour le libertarien, un tel raisonnement est potentiellement dangereux. Si SportPerson n’a pas de droit sur les bénéfices dégagés grâce à l’exercice de ses talents, cela signifie qu’il n’est pas réellement propriétaire de ces derniers. Si ses talents et ses compétences ne lui appartiennent pas, on ne peut pas dire non plus qu’il est propriétaire de lui-même. Mais s’il n’est pas propriétaire de lui-même, qui l’est? Voulons-nous vraiment accorder à la communauté politique un droit de propriété sur ses citoyens?
Si je possède mon corps, ma vie et ma personne, devrais-je avoir la liberté de faire ce que je veux avec eux, tant que je ne fais de mal à personne? Puis-je, par exemple, vendre un de mes reins? Ou même les deux?
Un des arguments mobilisés en faveur de l’achat et de la rente des reins repose sur la notion libertarienne de propriété de soi: si je suis bien propriétaire de mon propre corps, je devrais pouvoir librement vendre mes organes.
Quelle est la limite? Le suicide est-il permis dans le cadre du libertarianisme?
Conclusion
Selon le libertarianisme:
- Propriété de soi. Les individus ont une propriété absolue sur leur corps, leur vie et leurs talents. Cela signifie que chaque personne a le droit de décider de ce qu’elle fait de son propre corps et de sa vie, tant qu’elle ne porte pas atteinte aux droits des autres.
- État minimal. Le rôle du gouvernement doit se limiter à la protection des droits individuels — à savoir assurer la sécurité et faire respecter les contrats.
- Opposition à la redistribution : Aucune forme de redistribution des richesses par l’État n’est justifiée, car cela viole les droits individuels. La taxation à des fins autres que celles de l’État minimal (comme les programmes de protection sociale) est assimilée à du travail forcé et porte atteinte à la liberté personnelle.